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On a souvent tendance à opposer la ville et la campagne : c’est une erreur dans laquelle à la fois les habitants, les décideurs et les professionnels s’engouffrent fréquemment.

C’est bien sûr une erreur car l’une ne peut vivre sans l’autre. Depuis ses origines, la ville s’est nourrie, au sens propre, de la campagne. De son côté, la campagne a eu besoin de la ville pour y trouver les produits, les ressources et l’écoulement de ses productions. De nos jours, on assiste à une renaturation des villes, et, à l’inverse, les campagnes se peuplent d’urbains qui importent leurs exigences et leurs modes de vie. J’y reviendrai un jour dans ces colonnes.

« La ville est invivable à cause de la voiture. La campagne est invivable sans la voiture ». Cet adage reste vrai : chacun aspire à des villes calmes, sures, apaisées, pédestres, cyclables et hors la ville, la dépendance à l’automobile est permanente.

Car, à partir des années 70, le péri-urbain s’est étalé de plus en plus loin, dopé par le fractionnement administratif de la France, par le développement des infrastructures et la démocratisation de la voiture. Dans les bourgades et les villages, l’urbanisme a fait la même erreur : celui d’un étalement rural. Des lotissements se sont bâtis en plein champ, à la recherche de calme et d’une « soi-disante nature ». Chacun a alors constaté la fermeture des cafés, des petits commerces, des services. Mais qui peut faire son bénéfice quand les villages perdent leur coeur, leur centralité et la nécessaire cohésion qui leur donne une âme ?

Le point qui me soucie le plus est ainsi celui de la mobilité dans ces zones rurales. Quand je les observe, je constate qu’elles sont le parent pauvre des aménagements en matière de déplacement. Il est très rare d’y trouver des pistes cyclables. Traversées le plus souvent par des routes départementales, les villages sont le règne de la bagnole. Et l’étalement qu’ils ont subi renforce cet domination. Les habitants des lotissements prennent le plus souvent la voiture pour aller chercher la baguette, conduire les enfants à l’école primaire, poster une lettre… et c’est la bagnole 20 fois par jour avec le cortège de pollution, de consommation et de stress qui s’ensuit.

Au dela de ce constat, y-a-t-il des solutions ? Oui bien sur ! Au moins 3 :

  1. Créer partout des cheminements doux intracommunaux.

    Imaginons une bourgade où il est simple et direct d’aller à pied et compliqué d’aller en voiture… Des maires l’ont décidé : je pense, par exemple, aux communes du périurbain de Rennes. Le transfert voiture→vélo et piéton s’est fait très vite et très naturellement. Le pédibus est devenu le mode normal de déplacement des écoliers, en toute sécurité car au coeur des habitations. La promenade du dimanche après-midi devient alors un moment de rencontre paisible. Un autre mode d’habiter et de vivre se met en place.

  2. Libérer les trottoirs et les rendre aux piétons.

    Là il y a du boulot, car depuis très longtemps, le français considère que devant chez lui, c’est chez lui : « son trottoir » où il peut mettre « sa voiture ». « Tant pis pour les piétons, ils passeront sur la route » : insupportable ! La loi de 2005 sur l’accessibilité et l’article R417-10 interdisent ces pratiques détestables et dangereuses. Il faut redonner aux maires une vraie culture de l’espace public car, on le sait bien, sa privatisation et sa confiscation sont un risque permanent. Quel parent acceptera en effet de laisser partir ses enfants à pied à l’école si l’impossibilité d’utiliser le trottoir oblige à marcher sur la route ?

  3. Etre novateur dans les mobilités rural/urbain.

    Sur ce sujet, compte-tenu de la non rentabilité des transports publics tels qu’ils s’entendent en zone urbaine, il faut explorer des solutions originales pour les déplacements domicile-travail. Le gisement le plus prometteur est dans la systématisation du covoiturage. La plupart des véhicules rejoignant ou quittant les bassins d’emploi sont encore, pour la plupart, mono­passager. Le covoiturage pourrait être complété par un « autostop organisé en transport » (AOT), forme la plus souple du transport en commun : un abri judicieusement disposé, permettant un arrêt temporaire sûr, attractif, éclairé, avec affichage associatif, pourrait permettre à des voyageurs - occasionnels ou pendulaires – de solliciter des conducteurs de passage. Des territoires ont ainsi mis en place, pour le plus grand bonheur des usagers, le « REZO POUCE ».

    Mais bien sûr, à l’échelle intercommunale, les collectivités doivent faciliter la mobilité douce entre les bourgs périphériques et la ville-centre : 10 à 20 kms en VAE pour se rendre au travail en traversant la campagne : quel bonheur... !

    Pour l’intra-intercommunal enfin, seul un Transport à la Demande organisé à l’échelle locale par l’intercommunalité me parait être une solution viable et pérenne. Car il restera une majorité de personnes ne pouvant - pour des raisons d’âges ou de santé – utiliser les modes doux.

 

Philippe DRUON,

Président du CPIE Villes de l’Artois